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Depuis 1974, les groupes suisses organisent, à tour de rôle, leur rencontre régionale, et ce à l’instar des régions de France. La mémoire de ces rendez-vous se trouve dans la revue franco-suisse Foyers mixtes du Centre Saint-Irénée, dont le directeur, le Père René Beaupère, n’a pas manqué une seule des vingt rencontres romandes( !), encourageant les Suisses à poursuivre leur vocation spécifique, malgré leur relatif confort oecuménique...
La tradition des rencontres régionales pour la Suisse romande veut que le groupe local qui organise le week-end romand passe le témoin aux membres d’un autre groupe, qui sera chargé d’inviter les foyers mixtes de toute la Romandie à la rencontre suivante dans son Canton, et ce environ dix-huit mois plus tard. C’est ainsi que, de fois en fois, se reproduit le miracle des retrouvailles et de la découverte de nouveaux couples ou groupes. Mais il arrive aussi, hélas, que l’on se perde de vue, notamment parce que, faute d’un véritable secrétariat, le fichier d’adresses que l’on se transmet n’est pas toujours complet...
Un autre phénomène, significatif, est à signaler :
la participation faible, quand ce
n’est pas nulle, de couples ou groupes de couples issus des Cantons historiquement réformés
(Genève, Neuchâtel et Vaud). Le Canton de Vaud, par exemple, connaît encore trois à quatre groupes de foyers mixtes, mais dont les membres ont, pour la plus grande part, résolu les questions classiques qui surgissent à l’occasion du baptême, du catéchisme et de la confirmation des enfants. Ils se retrouvent, par amitié et fidélité, pour discuter ou approfondir des thèmes ou des textes théologiques (Un groupe de Lausanne étudie actuellement l’excellent livre « Pour la conversion des Eglises » du Groupe des Dombes). Si la plupart de ces groupes ne semblent pas appelés à jouer un rôle de conseillers pour de plus jeunes couples confrontés à leur tour aux mêmes questions, l’un d’entre eux, au moins, se dit prêt à accueillir des nouveaux... A bon entendeur !
Un constat doit être fait : il semble que, depuis un certain temps, dans ces Cantons appelés « mixtes » par nos collègues catholiques, « le problème est qu’il n’y a plus de problème » ... Il est vrai que les relations oecuméniques y sont généralement bonnes et que prêtres et pasteurs ont dû y apprendre à collaborer couramment. Mais à y regarder de plus près, force est de constater que la génération qui a vu et salué Vatican II fait place aujourd’hui à de jeunes ecclésiastiques pas nécessairement formés ou sensibles à l’oecuménisme tel qu’il est vu et vécu par les foyers mixtes. On assiste, dans l’une et l’autre Eglise, à un certain « retour identitaire » pas toujours favorable aux acquis dans la pastorale des familles interconfessionnelles. Que ce retour identitaire soit marqué ou non, une question demeure : la confiance réciproque des Eglises et l’expérience de plus de trente ans de pastorale commune auprès des foyers mixtes signifient-elles pour autant que la tâche des Eglises auprès des familles interconfessionnelles ainsi que la tâche des familles interconfessionnelles auprès des Eglises ne soient plus nécessaires ? S’agit-il de résoudre des problèmes pratiques seulement ou d’approfondir toujours davantage notre unité par une reprise constante d’un dialogue qui produise du fruit?
Si les Cantons « protestants » semblent avoir dépassé les années où s’inventent avec enthousiasme, audace et, parfois difficulté, les chemins d’une vie familiale partagée entre deux paroisses de confessions différentes, on peut constater que le mouvement des foyers mixtes retrouve, en Suisse romande, un second souffle dans les Cantons catholiques que sont Fribourg, le Jura et le Valais. En effet, les trois derniers week-ends romands ont été organisés par des groupes qui vivent, ces temps, les « phases existentielles » connues des familles se posant les questions du baptême des enfants et de leur éducation religieuse.
- Les 29 et 30 mai 1999, à Arzier, un groupe genevois a organisé le premier week-end qui a suivi le 1er Rassemblement mondial des foyers mixtes au COE autour du thème « Etude de l’Evangile de Jean 13 et 14 ».
- Les 23 et 24 septembre 2000, à Sapinhaut, le groupe valaisan de Martigny a laissé ses vignes, malgré les vendanges toutes proches, pour animer une session sur « La Trinité, source de la famille » avec le concours du pasteur Jacques Nicole et du Père René Beaupère. (cf F.M. no 127-128 p.29).
- Les 17 et 18 novembre 2001, à Charmey, le groupe de Fribourg invite Mgr Bernard Genoud, alors nouvel évêque du diocèse de Lausanne Genève et Fribourg ainsi que le président du Conseil synodal fribourgeois, le pasteur Daniel de Roche, pour ouvrir un week-end intitulé « Transmettre la foi » et articulé autour du texte magistral de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine (Jean 4). (cf F.M. no 132-134 p.63)
- La 20ème rencontre romande est convoquée par le groupe toujours jeune des jurassiens les 8 et 9 mars 2003 à Delémont. Le texte étudié est celui du Pain de Vie (Jean 6). (cf F.M. no 139 p.31)
A noter au passage que, en plus de la participation fidèle du Père Beaupère, le couple Ruth et Martin Reardon de l’AIF (Association of Interchurch Families) a pris part au week-end valaisan et au week-end jurassien et en a même fait un rapport dans le bulletin britannique. Les liens internationaux ne sont-ils pas à encourager entre les conférences mondiales ?
Le pasteur Richard Ecklin se souvient :
L’expérience et le credo d’un vieil ami des foyers mixtes.
Impossible de faire un rapport sur les foyers mixtes en Romandie sans évoquer, aux côtés du Père Beaupère, leur plus fidèle ami de Neuchâtel, le pasteur Richard Ecklin, longtemps membre du Comité de la Revue Foyers mixtes avec son épouse Claudine, et dont il a été le Conseiller théologique réformé. Voici, en guise de complément, le résumé d’une page que j’ai demandée à cet ami inconditionnel des foyers mixtes, que vingt années de retraite n’ont jamais empêché de vouer à leur pastorale. Un inlassable prophète de la cause oecuménique, que notre ami Richard!
Parmi ses nombreux souvenirs, la célébration de quatre baptêmes d’enfants de foyers interconfessionnels dans la Communauté de Grandchamp au mois d’août 1979. Qui nous rappelle à la fois d’où nous venons et où nous en sommes toujours... Quatre familles profondément attachées à leurs deux Eglises n’ayant pu se résoudre à choisir un seul lieu pour baptiser leurs enfants, le pasteur et le prêtre ont accepté de baptiser les quatre nouveaux-nés à tour de rôle, non sans s’assurer que les baptêmes seraient inscrits dans l’un et l’autre registres pour chacun des enfants. Les autorités ecclésiastiques protestent : oecuménisme sauvage ! Pratique irrégulière ! En effet, les autorités argumentent que c’est bel et bien en raison de la reconnaissance mutuelle du baptême en Suisse (sur la base de l’accord du 5 juillet 1973 entre la Fédération des Eglises Protestantes de Suisse, la Conférence des Evêques Suisses et l’Eglise catholique-chrétienne), que ce dernier doit être célébré et inscrit dans une seule Eglise concrète, et non dans un cadre aménagé exceptionnellement (Baptême et rattachement ecclésial dans les foyers interconfessionnels. Réflexions et orientations coéditées par la FEPS et la CES en juillet 1987). « Mais où se situe l’irrégularité ? Dans ces foyers mixtes où dans la division des Eglises qui refusent l’hospitalité eucharistique ? »
Et le pasteur Ecklin d’ajouter : « Si les couples mixtes sont bel et bien mariés et bénis devant Dieu, ce sont les Eglises, hélas, qui demeurent si lentes à se rejoindre. Si elles étaient au moins « fiancées » ! Quatre baptêmes célébrés dans une atmosphère de fiançailles ecclésiales : une vraie fête, beaucoup de foi et de prière... au-delà des déchirements et des turpitudes qui ont jadis affecté les Eglises, et en dépit des immobilismes et de la désintégration actuelle du sens ecclésial. Ca ne fait pas « la une » des journaux, mais cela peut ouvrir à la vision d’une fraternité étendue à l’infini, englobant tous les siècles, tous les peuples et civilisations, avec Jésus-Christ au centre de l’histoire universelle et ... tout au bout du chemin, les noces de l’Agneau et de son Eglise. »
Textes académiques et textes officiels :
Malgré tout, les foyers mixtes objet de recherches et reconnus partenaires du mouvement oecuménique.
Il est intéressant de noter que dans les années nonante, la Faculté de théologie protestante de l’Université de Lausanne a été le lieu de recherche pour deux mémoires de licence consacrés à la question des foyers mixtes :
- Invités du Christ . protestants et catholiques à la même table ? par Pierre VUILLE (membre d’un foyer interconfessionnel) en 1990
- Les foyers mixtes : enjeux éthiques pour la compréhension du mariage et le rapprochement des Eglises. Réflexion à partir de la question des foyers mixtes catholiques-protestant dans le Canton de Vaud. par Sibylle PETER en 1994.
La Faculté de théologie catholique de Fribourg accueille, elle, le mémoire de licence d’une étudiante - fille de foyers mixtes engagés ! - qui, après une demi-licence à la Faculté protestante de Lausanne, a décidé de terminer ses études à Fribourg :
- Les foyers mixtes catholiques-protestants dans le Canton de Vaud : état des lieux à l’aube du 3ème millénaire. par Annick BARBLAN en 2000. (cf F.M. no 131 p.32 ; le texte du mémoire est disponible sur CD-Rom)
Fait remarquable dans le grand diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg : de 1997 à 2000 s’est tenue une Assemblée diocésaine connue sous le nom d’ « AD 2000 ». Le cinquième des 9 documents produits par les membres laïcs et ecclésiastiques de l’assemblée, puis signés par l’évêque, est intitulé « Pour une Eglise qui persévère dans l’oecuménisme ». On y trouve plusieurs mentions des foyers mixtes (c’est nous qui soulignons dans le texte) :
- Sous le chapitre consacré à la « Situation générale », l’un des points évalue que « Aujourd’hui encore, comme par le passé, des foyers mixtes jouent un rôle essentiel dans l’avancée de l’oecuménisme, par leurs expériences, leurs interpellations, leur capacité à vivre la différence comme une source d’enrichissement mutuel ; pourtant beaucoup d’entre eux connaissent un découragement face à leurs Eglises. »
- A l’enseigne du chapitre suivant « Spiritualité » qui veut encourager une spiritualité oecuménique, la dernière demande (6) : « L’Assemblée invite des chrétiennes et chrétiens de foyers mixtes à partager leurs expériences avec les communautés chrétiennes à la recherche de l’unité. »
- Dans le chapitre consacré à la « Pastorale », il est noté que sa dimension oecuménique « dépend des personnes, des lieux et des circonstances » et qu’ « il n’y a pas de stratégie commune au niveau cantonal et encore moins au niveau romand. La collaboration dans la préparation au baptême, à la confirmation et au mariage est plus ou moins difficile. Les aumôneries par contre vivent une collaboration oecuménique plus étroite.». D’où la dernière demande (11) de l’Assemblée : « vivre la préparation au mariage et au baptême dans un esprit oecuménique. »
- Le chapitre consacré à l’ « Hospitalité eucharistique » doit se résoudre à constater que les « divergences de positions et de pratiques au sein des communautés catholiques et entre les Eglises ne permettent pas à l’Assemblée, pour l’heure, de prendre des décisions concernant l’hospitalité eucharistique qui fassent l’unité. De ce fait, l’Assemblée renonce à préciser ces critères. Par contre, elle propose un cheminement vers une meilleure compréhension de l’eucharistie. » Voulant tendre vers le partage non seulement de la Table de la Parole, mais aussi de celle de l’Eucharistie, l’Assemblée demande aux communautés catholiques d’approfondir la réflexion théologique sur le mystère eucharistique (15), à l’Evêque de prendre part à ces temps d’échange (16) et « que non seulement la question des couples mixtes soit au centre des discussions, mais aussi que ces couples puissent prendre une part active à la réflexion sur l’hospitalité eucharistique. »(17). (Document publié intégralement dans F.M. no 127-128 p.41-46)
A Rome, en marge du 2ème Rassemblement mondial, sur l’initiative de quelques couples français, l’ensemble des participants francophones sont invités à débattre de l’opportunité de fonder une Association des foyers mixtes de langue française, et ce pour des raisons de lisibilité meilleure du mouvement, si bien soutenu pourtant par le Centre Saint-Irénée. Comment aller dans cette direction sans qu’une association nouvelle ne fasse doublet ou même ne porte préjudice à la structure existante ? Tel est l’enjeu du débat, et les Suisses savent l’importance de garder les meilleurs liens au Centre Saint-Irénée, garantie tout à la fois historique, théologique, pastorale, culturelle et internationale de l’unité des groupes et groupements de foyers interconfessionnels.
Conscients de devoir opérer une évolution plutôt qu’une révolution, l’ensemble des couples helvétiques ayant participé au Rassemblement de Rome appellent de leurs voeux la création toute prochaine d’une Association suisse (romande ?) des familles interconfessionnelles liée au Centre Saint-Irénée de Lyon et « affiliable » ou « jumelable » avec l’Association française. Le jour n’est-il pas venu d’être davantage visibles dans notre pays ? On le voit bien : les week-ends romands s’organisent tant bien que mal, mais sans véritable service de secrétariat ; les Eglises parlent de nous, mais sans avoir de vis-à-vis officiel. A titre d’exemple personnel : j’écris, fin juin, à tous les évêques et à tous les conseils synodaux de Suisse pour leur annoncer le 2ème Rassemblement mondial à Rome et les rendre attentifs au courrier qui en résultera. Mais je n’ai que ma petite signature et un logo déjà dépassé pour donner du poids à mon courrier, auquel prendront la peine de répondre quelques directions d’Eglise seulement. Avançons donc, confiants et priants.
Fribourg, fin septembre 2003
Pasteur Jean-Baptiste Lipp
3rd Floor,
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London,
EC2V 8EG.
Telephone: +44 (0)20 3384 2947
Email: info@interchurchfamilies.org.uk
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